Un monde de bulles. Un monde de champagnes. Un week-end en Champagne.

Tout a commencé un matin de fin octobre. La brume est dense. Le paysage champenois a du mal à s’extirper de sa torpeur matinale. Il avait pourtant été bien spécifié qu’il fallait s’habiller chaudement car vous comprenez « Ce n’est pas le Sud ici ! ». Ben voyons ! On s’en doutait un peu … y a pas un Sergio à 10 bornes à la ronde pour nous huiler le dos réchauffer les mains. Tu es là avec tes mitaines et ton poncho à grosse laine façon bibendum prête à faire du roulé boulé à la moindre pente descendante.

Une amie bien intentionnée te dira en voyant tes mitaines: « Hey ! Pas pratiques les gants pour boire du champagne ». Or, elle ne sait pas que tu as développé une technique pointue limite scientifique pour justement pouvoir déguster à 10h30 le matin sous une brume polaire avec des mitaines. Car « Naaaaaaaaaan ! C’est pas gants ». Là, réside la subtilité pour pouvoir attraper le pieds de la flûte glacée dans ta main sans la retourner illico presto dans un faux mouvement de tes doigts engoncés dans la laine (le poncho fait déjà son affaire, ne l’oublies pas). Admire quand même la réflexion.

10h30 donc, tu t’installes sur ta chaise et tu t’apprêtes à vivre une expérience extrême à savoir déguster 3 Champagnes sur les remparts d’un magnifique château mais que tu vois même pas la profondeur des douves tellement le brouillard, oui toujours lui, veut rester à sa place. A croire qu’il veut sa part de bulles.

Tu te sens bien, le Champagne est frappé, les bulles dansent devant tes yeux, titillent ton nez et vagabondent dans ton palais. D’aucuns te diront que « Sacrilèèèèèèèège ! Quooiiiiiii ???? Tu craches ??? Mais jamais euh de la vie euh ! ». Sauf que tu te connais un peu de ce côté là et tu sais que tu n’as pas envie de finir au fond des douves (tu n’as pas pu encore mesurer leur profondeur à cause de vous savez qui).

Tu en es là de tes réflexions bullesques météorologiques quand soudain, comme un cri venant déchirer l’air si paisible car figé par le froid, surgit le son de la … BANDA !!! D’abord un son somme toute ténu pour se rapprocher inexorablement vers le lieu où te trouves. Une déflagration de percussions vient interrompre le processus de la dégustation. Personne ne bouge, la flûte à la main et les oreilles débouchées comme la bouteille de champagne. La réalité te prend de plein fouet et le brouillard commence à s’estomper. Magie des bulles et de la musique.

Et là, tu prends tu te prends un uppercut, le souffle court. Tu dévores la vue qui s’offre à toi. Tu domines la ville, tu prends conscience des pierres qui t’entourent, des arbres qui font cercle autour de toi. Le soleil prend sa place et promet un doux réchauffement des bulles alors que la journée du Champagne bat son plein maintenant.

Mais il est temps pour toi de revenir à la réalité. Tu ne sais pas à quoi t’attendre exactement. Tu te doutes juste que tu vas passer un bon moment à cuisiner. Parce que oui … tu n’es pas juste là pour t’arsouiller au Champagne, hein ?! T’es là pour profiter ok mais t’es surtout là pour relever un défit ! Celui de cuisiner un panier surprise en binôme avec une vigneronne du cru. Et quelle vigneronne ! Tu ne pouvais pas tomber mieux (en même temps, vaut mieux pas tomber vu la hauteur des douves qui t’ouvrent grand les bras). Elle est pétillante comme son Champagne, son regard est net comme le nez de son Champagne, sa gouaille est aussi  charmante et acidulée   que son Champagne.

Il n’en fallait pas plus pour se sentir en confiance et laisser s’exprimer le flot des saveurs et des arômes que nous offrait le Champagne de Dominique, le Champagne Fleury-Gille à dominante Meunier.

Au menu du panier: des suprêmes de volaille, de l’orange, des coings, des pommes, de l’oignon rouge, des blettes, des légumineuses de la région, des carottes …

Au premier abord, un panier des plus déroutants. Mais au final, après un, deux, trois, quatre … flûtes et de « T’es sûre ? Attends ! On va déguster ! » (OH WAIT ! On est consciencieuse ou l’on est pas) et bien nous tenions notre plat.

Le Champagne Fleury-Gille que j’ai eu le plaisir de déguster est un Champagne frais et gourmand à dominante Meunier. Il s’agit de la Cuvée Carte d’Or. Du fait de sa fraîcheur et de sa convivialité, il pourra être servi à tout moment du repas ou à tout moment de vos envies.

C’est pour cette raison que nous avons décidé de nous pencher sur la fraîcheur du plat avec l’orange en dominante et travaillée selon différentes techniques. La prise de risque aura été d’utiliser la blette puisqu’il nous manquait une note de croquant et que l’avons cuisinée juste à l’étuvée.

J’ai eu à coeur de refaire cette recette au calme, dans ma cuisine. J’ai souhaité des éléments que nous n’avions pas pu mettre dans notre assiette soit par manque de temps soit par manque d’ingrédients. Cette histoire de croquant me turlupinait et empêchait mon cerveau de buller tranquillement. Avec Dominique, nous avions convenu qu’il nous aurait fallu des noisettes car les blettes, seules, ne suffisaient pas. J’ai donc pensé à inclure une croûte de noisette et d’orange et de noisettes concassées et torréfiées pour apporter de la chaleur et de la rondeur à un plat et un Champagne qui tendaient vers une note acidulée certaine du fait de la présence des agrumes.

J’ai gardé les blettes. Cependant, chose que nous n’avions pas fait sur le moment (je pense d’ailleurs que cela nous a joué des tours sur la dégustation finale quant à l’accord met / champagne), les blettes ont été crémées et se sont vues adjointes un zeste d’orange.

Les carottes ont été cuisinées en mousseline cuites avec un mélange eau et jus d’orange. Et en parlant de l’orange, j’ai gardé notre idée de réduction d’orange, une réduction bien sirupeuse réveillée par une pointe de gingembre.

Je vous présente donc: Volaille rôtie en croûte des bois et orange, mousseline de carottes, blettes à l’étuvée et réduction d’orange

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Il vous faudra pour 4 personnes

4 blancs de volaille

500 grammes de carottes

4 belles oranges à jus

4 belles feuilles de blettes en ne gardant que le vert

40 grammes de beurre

5 CS de noisettes

1/4 botte de persil

2 CC gingembre en poudre

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Et comment qu’on fait ?

La croûte des bois et orange

Garder de côté 1 CS de noisettes.

Laver le persil et une orange. Equeuter le persil. Dans un mixer avec un couteau en S, mixer le beurre coupé en morceaux, les noisettes, les zestes de l’orange, le persil. Mixer jusqu’à obtenir une pâte.

Déposer cette pâte sur un papier sulfurisé. Poser une autre feuille de papier sulfurisé sur la pâte et à l’aide d’un rouleau à pâtisserie, étaler la pâte sur 2 mm. Entreposer au congélateur en gardant la pâte ainsi abaissée entre les deux feuilles.

La mousseline de carottes

Eplucher les carottes et les laver. Les tailler en rondelles. Prélever les zestes d’une orange et les réserver pour les blettes. Presser le jus de l’orange. Faire cuire les carottes dans une eau bouillante salée juste à hauteur et ajouter le jus de l’orange. Une fois les carottes cuites, les égoutter et les mixer à l’aide d’un mixer plongeant. Lier la mousseline de carottes avec 10 grammes de beurre. Réserver.

La réduction d’orange

Presser le jus des oranges restantes. Faire réduire ce jus d’orange dans une petite casserole en y ajoutant 2 CC de gingembre en poudre jusqu’à obtenir une consistance sirupeuse. Attention de ne pas le faire trop réduire sous peine de caramel. Vous pouvez monter la réduction avec 5 grammes de beurre froid pour plus d’onctuosité.

Les blettes

Tailler le vert des blettes en lanières. Dans une poêle chaude et avec un peu de matière grasse, faire tomber le vert des blettes. Ajouter une CS de crème liquide et ajouter le zeste de l’orange précédente. Réserver.

La cuisson de la volaille

Faire chauffer une poêle avec un peu de matière grasse. Marquer les blancs de volaille pour obtenir une jolie coloration. Réserver.

Préchauffer le four à 210°C. Sortir du congélateur le beurre aromatisé. Enlever la 1ère feuille de papier sulfurisé et à l’aide d’un emporte pièce rectangulaire ou d’un couteau tailler un rectangle qui soit de la taille du blanc de volaille. Déposer ces rectangles de beurre sur les blancs de volaille et enfourner sur une plaque. Dès que la croûte atteint une coloration ambrée, sortir du four. Parer les blancs de volaille tout autour de la croûte.

Le dressage

Sur une assiette, dresser la mousseline de carottes. Déposer deux cuillères à café de blettes. Déposer sur la mousseline, un blanc de volaille. Dresser des gouttes de réduction d’orange tout autour de l’assiette. Terminer par la dernière CS de noisettes concassées et torréfiées à la poêle.

Servir de suite

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Et comment que c’était ?

J’ai bien fait de refaire / de repenser cette recette au calme. La fraîcheur et la gourmandise du Champagne Fleury-Gille Cuvée Carte d’Or se retrouvent parfaitement dans l’alliance de l’orange et de la noisette. Et l’amertume qui a sans doute été trouvée lors de la première dégustation se trouve maintenant totalement fondue par la crème et les zestes d’orange.

Je tenais à remercier les Champagnes de Vignerons pour leur confiance et pour le week-end que nous avons passé. Tout fut parfait.

Et je tenais à remercier du fond du coeur Dominique du Champagne Fleury Gille pour sa bienveillance à mon égard. Il ne faut pas oublier que le vigneron est le garant de la tradition, garant d’une vigne dite raisonnable et soucieux de transmettre son patrimoine.

A très vite !

Crédit photos: @sandrahygonnenc

 

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